Cette biographie se place à l’articulation du récit personnel et des manières dont j’ai pris part à ces chantiers de recherches.
Un travail de mémoire tardif sans retour aux archives, sans doute subjectif et incomplet.
Chaque lien en bleu renvoie au projet plus longuement traité.

CREDO FINAL

MONDES LOINTAINS À DISTANCE IMMÉDIATE

Go de nuit – Un jour au ghetto de Bel Air

Dans les « hors-lieux » où j’ai travaillé, les corps sont contraints et de nouvelles relations à l’espace et au temps émergent. Rien n’est figé, ni dans la domination, ni dans la capacité de s’inventer : « Le sujet se constitue à travers des pratiques d’assujettissement ou, d’une façon plus autonome, à travers des pratiques de libération » [Michel Foucault].

Si j’ai tenu à avoir un regard de l’intérieur en partant de l’expérience du terrain, c’est pour être en résonance directe avec  la compréhension du sens que les acteurs donnaient à leurs actions, à la perception de leur vie, à leurs inventions de langage. Pour y arriver, je donnais des gages de solidarité et de fidélité : la monnaie du temps. J’ai commencé par apprendre le hausa puis, au début des années 1990, j’ai cessé de prendre des notes préférant enregistrer tous les dialogues, faire traduire/transcrire, être sûre de recueillir les expressions et les intonations exactes. Je n’ai plus jamais changé de méthode : être au plus proche.

Go de nuit – Ami – le même jour au ghetto de Bel Air

ACTEURS NOIRS

La discrimination est un thème qui traverse mon travail, notamment quand il concerne le continent noir qui a du mal à sortir des stigmates ; c’est le continent à qui la Communauté internationale donne, c’est le continent d’où partent les migrants naufragés, c’est le continent de l’esclavage, de la colonisation, des recrutements forcés, des sans-papiers et cela rejaillit négativement sur les Afro-descendants de France, cela s’étend bien souvent au simple fait d’avoir la peau noire.

Après l’Océan -Otho [Djédjé Apali] – ©tomaBaqueni
Il a mis fin à sa vie en 2019, il reste dans mes pensées.

Face à ces poncifs, je me suis attachée à mettre en lumière des personnages en rupture avec les schémas d’Africains passifs qui n’auraient pas été complètement acteurs de leur histoire et ne seraient entrés que négativement dans celle des autres ; au mieux comme victimes, ce qui obture le regard sur eux. En élargissant la focale, l’Afrique est soit « maudite », soit « n’intéresse personne », ce qui freine l’émergence des acteurs noirs en Europe qui connaissent des difficultés de visibilité en dehors de quelques exceptions. On ne donne pas de rôle à ces acteurs et on leur reproche en plus de ne pas être « banquables » !

Après l’Océan – Tétanos – Olga – Shad -©tomaBaqueni
[Lucien Jean Baptiste, Sara Marins, Fraser James]

Une sorte d’apartheid de bonne conscience voudrait, qu’en plus, le cinéma sur les Noirs soit réalisé par les Noirs et, bien sûr, les femmes doivent filmer les femmes, les Bretons filmer les Bretons, et pourquoi pas, aux girafes les films animaliers ! Ceci revient à diminuer le nombre de rôles pour ces acteurs et à parquer le cinéma dit « africain » dans une zone communautaire. Inversement, rares sont les films faits par des Africains qui traitent d’Européens blancs par exemple. Pourquoi ? Des places immobiles inconscientes sont allouées, chacun dans sa case avec son identité cadenassée. Le concept d’ « identité » devrait être cantonné aux services publics en charge des cartes nationales, et ne plus être une catégorie de l’entendement. Il empêche de voir que les répertoires d’actions et l’économie des valeurs derrière les emblèmes sont poreux ; avant tout en mouvement et en hybridation.
« Tout honnête homme est un homme mêlé » [Montaigne]

Vidéo Tiken

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